Le poète ferrailleur part 1

Ce 1er novembre, il est 7h45 (nouvelle heure) et nous partons de Thourie, direction Lizio. Thourie et Lizio, ça sonne un peu copains de dessin animé. Et c’est finalement assez proche de la réalité. Pour le dessin animé car nous nous dirigons vers un univers enchanté (que je connais, mais les filles non). Pour les copains car Robert chez qui nous allons, connaît de l’enfance Hervé de chez qui nous partons. Dingue.

Rewind session 1 : j’évoque autour de la table du repas mon souhait d’enregistrer j’ai vu dans une chapelle, pour l’acoustique. Catherine me cite plusieurs pistes et s’exclame : « je sais, Lizio, le poète ferrailleur ! » Cette annonce fait tilt dans mon cerveau. Je l’ai visité cette petite chapelle qui n’en a pas l’allure (puisqu’elle est plutôt de forme ronde), si n’est la flèche au sommet. Je ne me souviens pas bien de l’acoustique, mais Catherine est assez dythirambique. Et l’idée même de faire ce coup de poker d’y aller sans vérifier me convient. Car j’ai un passif avec cet endroit. Je l’ai découvert il y a plus de 20 ans avec mes parents. C’était alors l’univers d’un homme et ses automates animés qui ravissait déjà les yeux. Mon père avait été fasciné par cet endroit car il était de ceux-là, de ces hommes qui font du beau avec leurs mains, beaucoup de récup’, d’inventivité et de poésie.

J’y était revenu il y a deux ans et le poète ferrailleur était devenu bâtisseur d’un village enchanté. Cela avait drôlement changé en 20 ans. La magie se déployait en pleine lumière. Alors pour toutes ces raisons, cela méritait un coup de poker.

Nous arrivons à Lizio. J’ai hâte que les filles découvrent. Robert nous attend. J’aime ses yeux bleus, ronds comme des billes d’enfant. Je lui parle du projet, il nous conduit à la chapelle qui, en fait, s’appelle le dôme, tout au fond du lieu. Le dôme est un lieu où il aime faire silence et méditer. Pour notre part, nous allons y chanter, cela fonctionnera t-il ?

Nous entrons dans ce dôme. Rond. Parquet au sol, joliment décoré. Quand on est au centre, on a comme un casque sur la tête. Haut lieu de fréquences. Étonnant. Robert nous laisse à notre affaire en ne sachant pas si cela nous conviendra...Prémonition ?
Le soleil est là. Nous déchargeons le matériel et prenons place dans un lieu normalement assez visité et dont nous profitons seules au monde puisqu’il n’ouvre au public qu’à 14h. Un vrai luxe.
A droite du dôme, une maison en construction et une femme qui y entre une bougie à la main. Je la salue. C’est Josiane qui sera, nous ne le savons pas encore, notre guide dans cet univers durant cette matinée.

Aujourd’hui c’est la Toussaint et elle vient célébrer la mémoire d’Élie, le fils de Robert décédé il y a quelques années dans un accident de voiture. Cette maison en construction est son palais comme elle aime le nommer. Que l’on vienne chanter dans le dôme aujourd’hui la touche. Et moi aussi je commence à me dire que vraiment cette virée en Morbihan est tout sauf anodine...Mon père, Élie, la Toussaint. Ambiance. Puissante.

Salomé installe les micros, je commence à prendre la température du dôme avec ma voix et la guitare. Il ne fait pas très chaud et mes doigts se refroidissent allègrement. En attendant, chacune vaque dans le village à la découverte des œuvres et des mots du poète. Il va falloir sonner le rappel car nous avons un objectif : enregistrer une chanson !

Premières prises. Je suis sur le petit banc circulaire, les filles face à moi. Mais je me sens un peu engoncée entre le bonnet, le poncho, le micro, pied de micro, pupitre. Pas simple cette affaire. Enregistrer à la fraîche alors que nous étions habituées au poêle, même si l’endroit est exceptionnel, ne se fait pas fluidement. Au bout de plusieurs prises, nous optons pour la pause café proposée par Josiane dans le café librairie accueil, histoire de nous réchauffer.

Mais nous ne sommes pas au bout de nos surprises…